Œuvre: Pedro Maná (MAHKU),Txain,Txai (Beau-frère, beau-frère), acrylique sur toile. 2021
ÉVÉNEMENTS
Art et récupération territoriale
Table ronde en compagnie d'artistes du collectif
Samedi, 3 septembre, 15h30 à 17h
Vernissage
Samedi, 3 septembre, 17h30 à 19h
Rencontre avec le commissaire
Samedi, 1er octobre, de 15h30 à 16h30
Daniel Dinato, co-commissaire-txai de l’exposition sera présent à la galerie pour accueillir et échanger avec le public
Plateformes artistiques dissidentes:
Table ronde & finissage
Vendredi 21 octobre 2021: 17h00 à 19h30
LES COMMISSAIRES
Ibã Huni Kuin, artiste, commissaire
et fondateur du MAHKU
Ibã Huni Kuin (1964) est un artiste, un chercheur et un txana, un expert des chants. Dans les années 1980, il a commencé des recherches avec son père, Tuin, et ses oncles pour faire revivre les chants huni meka et la langue hanxta kuin, la langue des Huni Kuin. C'est dans ce cadre de la recherche qu'il fonde en 2012, avec son fils Bane, MAHKU.
Ibã est également un activiste qui se bat pour l’affirmation de la culture des Huni Kuin et pour le renforcement de leur autonomie économique et politique. Cette politique d’affirmation passe par une stratégie d’alliances avec les autres groupes autochtones, mais également avec des txai (des alliés non autochtones). C’est dans ce contexte que Ibã Huni Kuin, en collaboration avec Daniel Dinato, a eu l’idée d’une exposition à l’extérieur du Brésil, qui permettrait à sa communauté de tisser des liens nouveaux.
Daniel Dinato, commissaire et anthropologue
Daniel Dinato (1990) a une formation en anthropologie sociale et en études curatoriales. Il effectue des recherches et travaille en collaboration avec le collectif MAHKU depuis 2016. Il est resté très proche des artistes du collectif depuis ce temps, surtout d’Ibã, avec lequel il a conçu le projet d’exposition « MAHKU - Vende tela, compra terra ». Il est actuellement doctorant à l'Université du Québec à Montréal, où il développe, en collaboration avec MAHKU, le concept de commissaire-txai, une pratique curatoriale à long terme fondée sur les affinités et la différence. Il est membre du Centre interuniversitaire d’études et de recherches autochtones (CIÉRA) et du Groupe de recherche interdisciplinaire sur les affirmations autochtones contemporaines (GRIAAC).
À PROPOS DE L'EXPOSITION
‘’…La musique est la vie, le nixi pae (ayahuasca) est la vie. La peinture est vivante dans le musée, dans la galerie, dans les maisons des gens, elle vit avec nous. La peinture est donc la vie.
La peinture est aussi notre arme. C'est-à-dire que c'est notre produit, notre production, tout comme la musique. C'est nous qui le produisons. Donc c'est ça, vends la peinture, achète des terres. Vends la peinture, achète une maison. Vends la peinture, achète un moteur. Vends la peinture, achète de la nourriture, des vêtements, des médicaments. Vends la peinture et aide des proches.
La toile/peinture reste vivante comme ça…."
Ibã Huni Kuin, 10 juin 2022
Pour le peuple Huni Kuin, une communauté d’environ 14,000 individus vivant dans l’État d’Acres au Brésil et au Pérou, prendre soin de la planète, c’est prendre soin du nixi pae (ayahuasca). La protection de l’ayahuasca est, en d’autres termes, intrinsèquement liée à la protection des forêts, rivières, terres et de l’existence tant physique, spirituelle et intellectuelle des Huni Kuins. C’est par le rituel de l’ayahuasca que la communauté accède à un espace-temps mythique à la rencontre du passé, présent et futur correspondant à un nombre infini de yuxin, des êtres indirectement visibles. Protéger l’ayahuasca, c’est protéger les conditions nécessaires à l’existence Huni Kuin.
MAHKU (Movimento dos Artistas Huni Kuin), un collectif d’artistes et chercheureuses Huni Kuin, veille à la sauvegarde et au renouvellement de leurs savoirs et terres ancestrales par l’entremise d’une pratique artistique contemporaine depuis maintenant dix ans. Le collectif crée des œuvres poétiques nous permettant de prendre contact avec l’ontologie relationnelle du peuple Huni Kuin en transposant les chants huni meka des cérémonies nixi pae, en peinture. MAHKU insère ses œuvres dans le marché de l’art contemporain sous la forme de murales et d’installations audiovisuelles. Ce processus, en plus d’inscrire une présence autochtone dans le milieu de l’art, permet de collecter des fonds qui sont ensuite redistribués dans la communauté par l’achat de terres, de nourriture, d’essence, de vêtements, etc.
Vende tela, compra terra (Vends de l’art, achète une terre) met en lumière les axes artistiques, politiques et communautaires du collectif ainsi que leur quête d’autonomie financière et territoriale. En 2014, MAHKU achète dix hectares de terres avec les fonds découlant de la vente d’une toile. Sur ces terres, iels établissent le Centre Indépendant MAHKU, un centre de recherche, d’expérimentation artistique et de préservation de la forêt et du savoir Huni Kuin. Ce geste inspire aujourd’hui le titre de l’exposition.
Fondé en 2012, MAHKU était à l’origine l’extension d’une recherche intergénérationnelle sur les chants huni meka par Ibã Huni Kuin, fondateur, chercheur et artiste, réalisée en tandem avec son père Tuni Huni Kuin et son fils Bane Huni Kuin. Au début des années 80, Ibã Huni Kuin commence à documenter les chants de son père et de ses oncles, devenant lui-même txana, maître des chants. Vingt ans plus tard, son fils Bane entreprend de transposer ces chants en images, une technique de mémorisation et de visualisation de leur trame narrative non linéaire. Par la peinture, les artistes de MAHKU traduisent les différents sens de l’huni meka, offrant au public un aperçu des mirações, visions induites par l’ingestion de l’ayahuasca et l’écoute des chants.
L’exposition regroupe des peintures, des dessins, des objets, de la documentation juridique et des enregistrements audiovisuels qui attestent de la complexité des revendications d’autonomie politique, culturelle et écologique de MAHKU et de leur utilisation de l’art comme pratique militante. Les gestes posés par MAHKU vont de pair avec les diverses mobilisations socio-politiques mises en branle par les communautés autochtones des Amériques pour le respect de leurs droits ancestraux et leur combat pour la justice environnementale.
L’exposition est une matérialisation du processus collectif entre collaborateurs autochtones et allochtones, soit Ibã Huni Kuin, co-commissaire et Daniel Dinato, co-commissaire-txai, Pedro Maná, Cleiber Bane, Acelino Tuin, and Kássia Borges, artistes de MAHKU et l’équipe-txai de la SBC galerie d’art contemporain. Ce partenariat s'étend sur les recherches de MAHKU et de Daniel sur le concept de txai voulant dire beau-frère/belle-sœur en hantxa kuin, langue Huni Kuin comme une façon de souligner un lien de parenté qui rallie une pratique de collaboration artistique à long terme basée sur les affinités et les différences.
LES ARTISTES
La peinture, principale production artistique de MAHKU, est née en 2012 du besoin de faire revivre des savoirs collectifs en voie de disparition, et consiste à traduire en images les chants huni meka, les chants qui guident les rituels d'ayahuasca, et certains mythes. Guidés par Ibã Huni Kuin, les artistes transforment et créent des ponts avec les allochtones à travers des peintures, des murales, des dessins et des installations tout en construisant des alliances et des stratégies d'autonomie.
Actuellement, les œuvres du collectif font partie de la collection du Musée d'art de São Paulo (MASP) de la Pinacothèque de l'État de São Paulo et de la Fondation Cartier, à Paris. Parmi les expositions auxquelles ils ont participé, citons Histoires de Voir (Fondation Cartier), Les Vivants (Fondation Cartier/Lille 3000), Mestizo Stories (Institut Tomie Ohtake), 35ème Panorama de l’art Brésilien: Brésil en multiplication (MAM-SP), Avenida Paulista (MASP), Vaivém (Centro Cultural Banco do Brasil), Vexoá: we know (Pinacoteca) et Moquém_Surarî: art contemporain autochtone (MAM-SP). Ainsi, grâce à une approche participative et collaborative, MAHKU diffuse les connaissances millénaires des Huni Kuin et attire l’attention sur une histoire continue d’oppression, d’exclusion et de déplacement des populations autochtones.
Crédits: Freddy Arciniegas
Crédits: Freddy Arciniegas
Crédits: Freddy Arciniegas
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